Mardi 19 février 2013 - 9h - Guillaume Orhan et moi-même arrivons au Prado où nous sommes chaleureusement reçus par l'équipe en place dans la salle d'accueil de jour. Nicolas Brilland, le directeur de l'établissement, nous conduit dans la salle de réunion, accompagné de Michèle, la plus expérimentée des éducateurs du site, afin d'organiser le tournage du documentaire.

Le Prado est un C.H.R.S. (Centre d’Hébergement et de Réinsertion Sociale) qui existe depuis 1997. Il se situe à côté de l'ancien cinéma de Nevers. Il vient d'être rénové. Il est géré par l'association P.A.G.O.D.E : Pour Accueillir Gérer Organiser Développer Ensemble. L’association P.A.G.O.D.E. regroupe 44 salariés et une quinzaine de bénévoles.

   Le CHRS du Prado est bien situé car proche de la gare et rassemblant tous les services sur le même lieu. Les travaux ont permis de rendre la structure plus humaine en transformant les dortoirs collectifs en chambres individuelles au nombre de sept. L’équipe tente de ne pas dépasser 21 hébergements, en revanche elle laisse ouverte la salle d’accueil de jour, la nuit, l’hiver, pour que chacun puisse se poser au chaud même s’il n’a pas de lit. La sécurité est toutefois préservée car chacun doit sonner pour rentrer et sortir.

   Le Prado est constitué d’une équipe d’éducateurs (comme Julie, Sébastien ou Michèle la plus ancienne), présente 24h sur 24h. Les éducateurs sont au nombre de six au sein de la structure et chacun prend le relais pour que la structure demeure toujours ouverte. Le travail des éducateurs, souvent spécialisés (c'est-à-dire qui ont appris à travailler avec des publics différents, mais peu importe le diplôme tout le monde fait le même travail), est indispensable car les arrivants sont souvent désociabilisés, sans hygiène, repliés dans leur carapace. Il s’agit de "toujours mettre du sens dans ce que l’on fait" quand on agit dans ce genre de structure. Tout se fait et se décide en équipe grâce aux réunions du jeudi qui regroupent tout le personnel du Prado. Les arrivants ne se voient pas attribuer une seule personne référente mais une équipe soudée. Ici, pas de structure pyramidale mais une équipe pluridisciplinaire. L’équipe doit aussi se préparer psychologiquement à accompagner les arrivants usés et malades dans leur chute. Elle doit rester consciente que l’on ne peut pas forcer les gens à adhérer à "la vie enfermée". Au mieux, il s’agit d’établir "une accroche" avec l’arrivant et de tenter de le guider en fonction de sa situation et dans le respect de chacun. L’éducateur sait qu’il faudra faire du cas par cas, du sur mesure...  

   A l’heure actuelle la structure déplore de ne pas dépenser plus de 40€ par jour par personne au lieu des 200€ nécessaires. Les financements sont insuffisants (Etat, Conseil Général, Mairie de Nevers, petites communes, adhérents). Le Prado voit 600 personnes différentes par an et 900/an en accueil de jour, ce qui est énorme. La politique du "logement pour tous d’abord" demeurera purement idéaliste si les moyens donnés actuellement insuffisants n’augmentent pas. L’équipe se voit parfois obligée de refuser une femme et son enfant.  P.A.G.O.D.E. est une association loi de 1901 "et toujours faire plus avec moins ce n’est pas possible", l’Etat devrait prendre aussi ses responsabilités.

    L’accueil au Prado est inconditionnel : on accueille tout le monde sans critère de sélection et même si l’identité demeure vague. La structure accueille souvent des personnes alcoolisées ou sous l’emprise de la drogue. C’est une des rares structures à accepter d’accueillir les arrivants avec leurs animaux. Les seules conditions d’accueil sont les suivantes : le respect des uns et des autres, l'interdiction des toxiques et de l'alcool au sein de l'établissement. D’année en année, les arrivants changent : l’image du vieux clodo routard avec son chien, ou bien celle du jeune festivalier, est dépassée. Aujourd’hui beaucoup de jeunes véritablement seuls, sans famille sur qui compter, et sans ressources, sont dans la rue, mais aussi beaucoup de plus 60 ans qu’un divorce, une pension, une faillite, des frais médicaux, des factures toujours plus élevées etc. ont conduit petit à petit à dormir dans leur voiture. L’hiver est une période tendue dans la mesure où les demandes d’hébergement sont nombreuses et l’espace restreint.  Le Prado propose un hébergement de 3 jours. Si une accroche est possible, si une dynamique de réinsertion est repérable chez l’arrivant, alors on dirige celui-ci vers un appartement de stabilisation en collectivité dans un autre secteur (quartier du Banlay à Nevers 22 places – Imphy 15 places ...). La vie en collectivité et un bon moyen de réapprendre à vivre avec les autres.

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               Le Prado gère plusieurs services :

  - l’accueil de jour : salle ouverte en bas chaleureuse, conviviale avec café, internet.
  - le vestiaire : machine à laver, douche, bagagerie.
  - le restaurant social : salle au fond de la cour intérieure mixte car les salariés y déjeunent également.
  - les appels du 115 de toute la Nièvre : toute l’épique est formée pour répondre à ces appels ; la majorité des appels concerne une demande d’hébergement mais parfois il faut se déplacer en urgence pour aller sauver le vie de quelqu’un qui se retrouve seul dehors en plein froid.
 - l’antenne santé avec la présence d’une infirmière spécialisée en alcoologie travaillant en immersion par entretiens.
-  le partenariat avec le CMP : la rue génère des troubles psychiatriques et les troubles psychiatriques peuvent conduire à la rue.

- le partenariat avec la Mission Locale pour les jeunes : si constat d’un dynamisme de construction l'arrivant est dirigé vers le service intégré d’orientation avenue de la gare (centralise tous les partenaires qui peuvent venir en aide ), le Collectif de Solidarité (associations regroupées autour du guide social), l'Ecole de la 2^ème chance…, les appartements de stabilisation ou les logements durables pour mettre "en protection" et ainsi éviter que les plus jeunes ne côtoient trop longtemps les plus instables.

- le partenariat evec la protection civile pour les maraudes (3 par jour toute l’année) et la distribution des sandwichs l’hiver (en partenariat avec l’épicerie solidaire) : l’équipe tente de repérer les nouveaux arrivants et d’établir une accroche.

- le relais CPAM (pour permettre aux arrivants de bénéficier de la CMU un peu plus rapidement par exemple.

- le relais de protection civique

- L’équipe doit toujours lutter contre la mauvaise image que les gens peuvent avoir de leur centre. Il s’agit de tout faire pour que la structure s’ouvre sur l’extérieur et que les gens puissent venir à l’intérieur. En partenariat avec "Itinéraire singulier", bientôt une  expo sera accrochée dans la salle d’accueil de jour.
- L’équipe doit toujours rechercher d’autres partenaires et d’autres financements, cela demande un engagement très large et de tous les instants. Elle doit toujours rechercher d’autres bénévoles, espèce en voie de disparition... Un appel est lancé !
- L'équipe souhaite que les usagers aient leur mot à dire : C.C.R.P.A. a été instauré. C'est le Conseil Consultatif Régional des Personnes Accueillies.  Ce conseil permet aux usagés de donner leur avis, de faire remonter leurs remarques au niveau national. Il s’agit d’un collège d’usagers au pouvoir de vote.
- De nombreux projets sont en cours, dont notamment le rachat d’un bâtiment pour logements durables destinés aux malades psychiques
Les moments clés  pour le tournage seront :
- les matins 8h30 : petit déjeuner
- les  jeudis 17h à 18h fin de la réunion
- les soirs 18h à 21h30 : le coup de feu : appels au 115, chambres, repas etc ; 21h30 : arrivée du veilleur de nuit
- les dimanches matins 10h : réveil et tâches ménagères.