S'ouvrir à de nouveaux horizons

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Ne laissez plus chez vous cette partie de vous-même qui constitue votre identité propre : faites du cinéma ! Epanouissez-vous dans un projet de film, développez vos compétences artistiques, aiguisez votre regard, venez à la rencontre de l'autre, développez votre esprit critique, améliorez votre maîtrise des outils du cinéma et de l'audiovisuel, et ouvrez-vous à l'international !

samedi 20 avril 2024

Oscar Nesly a souhaité partager l'article de Télérama sur la série télévisée Le Bureau des Légendes :

 

Réalisé par Eric Rochant, avec Mathieu Kassovitz, Jean Pierre Darroussin, Sara Giraudeau et Léa Drucker

Les meilleures séries ont besoin de temps pour imposer leur univers et pour définir leurs codes. Elles ont besoin de temps pour prendre leurs aises, et nous laisser nous familiariser avec leur grammaire. C'est ainsi qu'elles vont plus loin sans nous perdre, nous font sans lourdeurs comprendre leurs intrigues les plus retorses et saisir leurs dialogues les plus abstraits. Elles évoluent en faisant confiance à notre intelligence. Dans un paysage audiovisuel français qui fait trop souvent preuve d'un didactisme plombant, Le Bureau des légendes, série patiente, précise et ambitieuse, fait un bien fou. Personnages subtilement dessinés, dialogues pointilleux, intrigues efficaces, remarquable cohérence narrative, elle ne cesse de s'imposer comme un modèle de rigueur, tout en parvenant à nous surprendre, nous émouvoir et nous faire rire.

Difficile d'expliciter l'intrigue des dix nouveaux épisodes sans gâcher le plaisir de leur visionnage. Elle repose sur deux pistes narratives principales, comme l'an passé : prisonnier de Daesh, Malotru, alias Paul Lefevre, alias Guillaume Debailly (Mathieu Kassovitz) endure une interminable torture, avec l'espoir de revoir un jour sa fille, Prune (Alba Gaïa Bellugi) et la femme pour qui il a tout sacrifié, Nadia (Zineb Triki) – tout en sachant que sa trahison rendra son retour mouvementé. Marina Loiseau (Sara Giraudeau), encore fragilisée par sa mission en Iran, voit elle sa « légende » de sismologue confrontée à nouvelle situation périlleuse. Arrêtons nous là, au risque d'être cryptique. Il sera question du FSB, de la CIA, de Syrie, de Turquie et d'autres pays dont nous tairons le nom, dans un jeu d'espions formidablement ludique et joliment romanesque. Mais toujours aussi crédible.

bureau des legendes saison 3

La première saison du Bureau des légendes, stricte, régulièrement didactique – notamment via la voix-off de son héros – revendiquait ses codes narratifs et esthétiques. Longs dialogues, technicité, scènes d'intérieurs, complexité des enjeux, elle exigeait du téléspectateur qu'il oublie ses habitudes – bye bye Bond – et se fasse à l'idée d'une rhétorique plus… bureaucratique. Elle intriguait, promettait mais, par notre faute ou par sa rigueur parfois rigide (ou les deux), elle peinait encore à tout à fait convaincre. Sa deuxième saison, en sortant de France, en donnant plus de place à Marina Loiseau, en se frottant plus franchement à l'actualité, trouvait le parfait équilibre entre méticulosité et divertissement, tension psychologique et action. Elle éteignait peu à peu la voix-off de Malotru, donnait plus de place aux autres personnages, prouvait qu'elle n'avait pas à rougir face à l'efficacité d'une Homeland.

Avec ce nouveau chapitre, Eric Rochant et ses scénaristes (Camille de Castelnau, Raphaël Chevènement, Cécile Ducrocq, Emmanuel Bourdieu, Capucine Rochant) continuent d'ouvrir les portes du bureau et d'explorer la nature chorale de leur oeuvre. L'Odyssée de Malotru, tendue, périlleuse, est une merveille de suspense, avare en bavardages et riche en idées de mise en scène (derrière la caméra, Samuel Collardey, Mathieu Demy, Antoine Chevrollier, Hélier Cisterne et Rochant lui-même). L'incertaine « réorientation » de Marina (qui piétine un peu, dans les premiers épisodes) offre une autre forme d'attente, moins brutale, plus feutrée, faussement tranquille. A chaque fois, les auteurs s'appliquent à exploiter au mieux la richesse des personnages et le talent de leurs interprètes. Kassovitz, roc à vif, se donne corps et âme au calvaire de Debailly, dans une impressionnante performance physique. Sara Giraudeau brille elle à nouveau de fausse naïveté, trouble à force de fragilité (feinte ?), faisant planer sur sa mission une vibration émotionnelle inédite. Les autres membres du Bureau, de Jean-Pierre Darroussin à Jonathan Zaccai en passant par Florence Loiret Caille, jouent tous une partition plus émotive que par le passé, entre anxiété et générosité.

 

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